Etape 3 : San Rafaël - San Juan / 561 kms
Écrit par Stéphane Hamard   
16-01-2012

Ce matin, encore un réveil matinal puisque je me lève à 04h30, mais tout va bien. On commence par une liaison de 291 kms sur le goudron, puis départ 2 par 2 pour une spéciale de 270 kms. Il faut faire très attention aux caps, car on « navigue » dans le lit des rivières. Impossible de « couper » d’un rio à l’autre donc hyper gaffe à la navigation, sinon on a vite fait de se retrouver loin, car une fois qu’on est parti dedans, difficile de repérer des notes sur le road-book. Le pilotage est très très technique, les gros cailloux alternants avec les crevasses et trous en tous genres. Toute la journée, c’est de la pierre, parfois en secteur trialisant ; Il faut faire très attention à ne pas mettre ses roues n’importe où car les jantes vont subir grave aujourd’hui. Le but du jeu est de garder suffisamment de vitesse pour ne pas trop se ruiner physiquement et enchaîner les passages sans se déconcentrer. De mon côté, ça ne se passe pas trop mal et en fin d’étape, je vois plusieurs motos arrêtées, en difficulté sur des « zones » inondées suite à de gros orages dans la région cette semaine. Il faut faire très attention car les pneus changent complètement de comportement entre le sec et le mouillé, surtout avec les bib rallye qui ont vite fait de vous « jeter » sur un angle de caillou mal visualisé. Les pierres mouillées et super piégeuses alternent avec des passages de sable profond et fatiguant. Les kilomètres ne défilent pas vite, et il faut s’accrocher pour ne pas céder à la lassitude des mêmes difficultés répétées. Le problème, c’est apparemment que l’angoisse est communicative ( !) car en voyant un groupe de 5 motos arrêtées sur un passage étroit, très technique et rendu très glissant par un cours d’eau, je me bloque avec eux sur un secteur que j’aurais dû passer avec de la vitesse. Je tente le franchissement « à l’arrêt » mais l’arrière se dérobe et je tombe à 2 à l’heure sur le côté droit. M…, ça devait passer sans problème mais les mecs arrêtés m’ont fait douter ! En plus, dans ces gros cailloux en vrac, je déchire le carénage mais ça devrait aller. Gaffe car sur une petite chute comme ça, un doigt coincé ou autre peuvent vous faire abandonner direct ! Juste de l’énergie gaspillée mais bon, je repars rapidement, et laisse les autres à l’agonie dans ce secteur. Ca va, je suis plutôt en forme et dans ces conditions difficiles, je me sens « monter en puissance », plutôt bon signe. On a traversé des canyons de toute beauté tout au long de la journée, mais j’avoue que les difficultés ont gommé mon plaisir de contemplation !! « En venir à bout », voilà plutôt ce que je ressassais !

En fin d’étape, on attaque des super montées et descentes sans adhérence dans des collines. Super chaud par endroit, il ne faut pas lâcher l’élan car le précipice vous avale !! C’est dans ces entrecoupements de pistes que je me perds : alors que je suis bien calé sur un Waypoint à passer, le road-book ne correspond plus du tout…. Surtout rester bien calme, mais à 20 kms de l’arrivée, en pensant aux autres qui rejoignent l’arrivée plein gaz, c’est le genre de truc qui met les nerfs à rude épreuve (et c’est le but de l’orga !!), et il ne faut surtout pas se désunir. Je croise  des motos dans tous les sens, et je rejoins même une piste que j’ai déjà passée ! Damned, je tourne en rond, calmos et analyse…. Ok, je vois mon pote Dimas le Brésilien partir sur une piste oblique à 180°, j’ai peur de comprendre ; En fait, j’ai pris le waypoint à l’envers et c’est pour ça que je ne reconnais plus le road-book ! Malgré le temps perdu, je me dis que j’ai un eu de chance car j’étais perdu « avant », sans le savoir, et je suis quand même content d’avoir « ramassé » ce waypoint un peu au hasard, sinon, c’est 20 mn de pénalités…

Arrivée « à fond », content de sortir de ce dédale de pièges.

En arrivant au camion malles, bonne surprise, Luc Alphand vient me chercher pour me proposer un direct avec Gérard Holtz sur l’émission Bivouac. Super, je pourrai faire parler de La Réunion, et on commente ensemble l’étape du jour sur France Télévisions, juste avant qu’une tempête de sable arrive, ce qui va nous compliquer la nuit ; Mais bon, en plein désert, ce n’est pas une surprise.

En faisant ma mécanique ce soir, je démonte le carénage avant pour aller le faire réparer par LOCTITE qui saura me le réparer avec ses produits « miracle ». Grosse frayeur, je découvre alors que le choc s’est fait précisément au niveau du bouchon de radiateur, et que la collerette est tordue. Zut, grosse angoisse car comme vous le savez, chaque minute est comptée pour moi le soir. La soudure est fissurée, je ne peux pas continuer comme ça, le radiateur va fuir quand il va monter en pression. Je vais voir mon ami Franck Helbert chez YAMAHA que je sais équipé d’un poste à souder l’aluminium. Le temps de le trouver dans ce bivouac de 3500 personnes, lui exposer le truc, négocier l’affaire ; il refuse de s’y risquer car on n’a pas assez de matière à ce niveau, c’est risquer de tout fondre. Et le temps qui passe, et la nuit qui est déjà tombée, faut pas tergiverser trop longtemps…. Je vais revoir LOCTITE qui va me proposer de colmater la fissure avec une pâte à carter. Bon ok, on essaie et on teste. Ils sont quand même super sympas, et une heure après (ils sont déjà pas mal sollicités de toute part !!), je fais monter ma KTM en température pour voir, ça a l’air de tenir, mais je ne suis pas vraiment rassuré, il faudra voir ça en pleine condition demain… Et c’est sûr, ça va chauffer sur les pistes, le thermomètre est monté aujourd’hui jusqu’à 45°c ! Avec tout ça, il est minuit trente passé quand je rentre dans ma tente…