Dernière
étape du Dakar 2014, ça se relâche un peu ce matin au bivouac.
Après
une liaison de 122 Kms, le départ de la spéciale est quand même particulier. On
sent que sur les 150 Kms de spéciale restants, on ne rencontrera pas de
difficultés, et que le podium d’arrivée nous est promis… sans être tenu !
Pour
cette dernière, le départ de la spéciale se fait dans l’ordre inverse du
classement général des motos. Ainsi, les pros, partants en dernier, devraient
avoir pas mal de dépassements à effectuer. Avant le départ, nous avons pas mal
de temps, et c’est le moment des dernières interviews, des dernières photos de
groupe, et tout le monde est détendu.
Tellement
détendu que lorsque l’officiel me donne le départ, je me rends compte que je
n’ai pas mis mon trip à zéro. Je suis donc complètement décalé sur le
road-book, et ça sent la déconcentration… Du coup, alors que le road-book m'indique le km 1, je suis sur mon trip au km 123, pas clair !... Heureusement, gros coup de bol, au km
9, on a une traversée de village avec une zone de vitesse limitée à 50, et je
vais profiter de cette zone pour me recaler. Alors que c’est le dernier jour,
que je n’ai plus rien à gagner, mais éventuellement tout à perdre, je ne peux pas m’empêcher d’aller
« chercher » la poussière devant moi… 1 puis 2, et encore 1 quad de
passé, je joue le jeu à fond, sans me poser de question ! Finalement, je
n’arriverai jamais à m’y faire…, quand le chrono est enclenché, je m’y mets à
fond. Je décide donc de continuer la course, grapillant 1 à 1 les concurrents
devant moi, je ne veux rien regretter. C’est parfois limite sur ces pistes à
flanc de montagne, avec une adhérence 0, mais tellement grisant de partir en
glisse en permanence !! Je prends un plaisir fou, surtout que je dépasse,
et que personne ne me rattrape ; je m’éclate, je veux en profiter jusqu’au
bout. Je me dis que dans quelques kms, tout ça sera fini, ce serait trop bête
de ne pas en profiter ! Même au milieu de la spéciale, quand on passe dans
un rio avec pierriers et sable mou, je ne dévisse pas, je suis euphorique. Il
faut dire qu’après toutes ces pistes et tous ces kilomètres, je la connais par
cœur cette moto ! Je me fais même quelques frayeurs sur des freinages en
glisse des 2 roues sur des virages qui ferment trop vite ! Et les cactus
sur les versants qui semblent me dirent « viens-là mon petit, viens
m’embrasser ! » Très peu pour moi, si je peux éviter…
Je
termine comme j’avais commencé, à bloc, et heureux ne n’avoir rien concédé à la
course.
La
ligne d’arrivée de cette dernière spéciale franchie, c’est un Grand Bonheur,
malheureusement difficile à décrire ici. Une émotion terrible qui vous envahit,
qui mêle la joie d’un sacré parcours accompli, et la tristesse que tout est
fini….
Mais
par-dessus tout, toute la fatigue et toute la nervosité accumulée remontent, et
il est difficile de rester zen. Nous sommes tous là à partager une émotion
unique. C’est l’aboutissement d’un parcours tellement fort, qui nous a éprouvé,
et qui va nous permettre de nous retourner bientôt sur ces 2 semaines de folie,
pour en sortir grandi.
L’arrivée
sur le podium final de Valparaiso est bien à la hauteur du symbole de ce Dakar
2014, plus long, plus intense, plus dur…
Je
suis grandi d’avoir passé cette épreuve, et suis fier de recevoir la médaille
du finisher 2014.
Je
suis fier aussi de vous avoir tous derrière moi, d’avoir pu partager des
émotions que seule une épreuve comme celle-ci peut fédérer.
Je
retiendrai une image forte, en revenant sur le prologue de Rosario : j’ai
lu une banderole dans la foule « Gracias Thierry SABINE ». En effet, je suis très
touché par cette attention. Car c’est GRACE, (ou A CAUSE selon les
circonstances de courses, lol) à Vous Thierry SABINE, que nous sommes encore
fascinés par cette idée folle de course de l’extrême. Alors MERCI Thierry
SABINE pour le mythe que vous avez créé.
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